Voyage en Champagne (1) : pop culture

    Eh oui, car la soirée mousse n’était qu’une préparation au week-end de trois jours organisé par le club œno en Champagne… Durant cette année bien remplie, le petit groupe des organisateurs a déjà fait une excursion à Cornas pour les Automnales de Jean-Luc Colombo et des ambassades à Reims et Épernay pour divers concours de dégustation. Mais c’est la toute première fois en vingt ans d’existence du club que nous mettons sur pied un voyage ouvert à tous les habitués de nos dégustations étudiantes. C’est Constance qui a tout organisé de A à Z, et avec une efficacité redoutable qui lui est propre : réserver un hôtel, comparer des restaurants, appeler des viticulteurs, planifier un programme parfait heure par heure, tout cela a été l’affaire de quelques semaines pour elle ! Il va falloir que je sois à la hauteur d’une telle coprésidente l’an prochain…

    C’est ainsi que par un beau vendredi de printemps, à une heure indécemment matinale, un autocar quitte l’école avec à son bord trente-six étudiants enthousiastes et assoiffés (de savoir, bien entendu). Direction Reims, où nous entrons d’emblée dans le vif du sujet avec une visite chez Ruinart. La plus ancienne maison de champagne (fondée par un moine bénédictin en 1729) ressemble à un château avec un petit jardin à la française. À l’intérieur, des pièces d’un chic moderne : lustres en cristal, caisses à bouteilles design et « winepaper », invention d’un artiste qui a incrusté des peaux de chardonnay dans le papier peint. Lors de la visite guidée des caves, je vois pour la première fois de vraies crayères anciennes, avec leurs lucarnes lumineuses si haut perchées au sommet de leurs cônes de pierre. De Ruinart, on retiendra la forme dodue des bouteilles, inspirée d’un flacon ancien retrouvé dans les caves, et une production assez limitée pour un si grand nom, car destinée principalement au marché français. Dans un magnifique salon, on nous réunit pour déguster deux vins rafraîchis dans des vasques ouvragées : d’abord le blanc de blancs, aux arômes de miel et de fruits jaunes, pas inoubliable mais avec de jolies touches de poire mûre. Puis le blanc de blancs Dom Ruinart, millésime 2004 sorti récemment de la cave, auquel je trouve des notes champignonnées très prometteuses au nez ; la bouche est ample, aromatique, grasse, avec des touches de noix de coco et de beurre frais relevées par l’iode et les agrumes, et une très belle longueur. Tout ce que j’aime ! Mais comme son nom semble fort bien l’indiquer, Ruinart n’est pas donné : je me passerai de faire banqueroute pour une bouteille du précieux liquide.

    L’après-midi se passe à visiter Reims, sa cathédrale, sa basilique Saint-Rémi avec le musée attenant, sa porte de Mars… Le soir, nous dînons au restaurant « Au petit comptoir », un bistrot gastronomique. La cuisse de canard confit et sa purée aux topinambours s’agrémentent d’un verre de vin du pays d’Oc (Domaine Preignes le Vieux, « Le petit pont », grenache, cinsault et cabernet-sauvignon), tout ce qu’il y a de plus fruité et solaire et pour moins de 5€ dans le commerce – un bon plan à retenir pour un dîner entre amis. Le dessert, un baba au ratafia de champagne avec une chantilly rose, est un tantinet moins convaincant, la couche supérieure de la verrine étant très peu imbibée ; en outre, le vin blanc qui l’accompagne (viognier et rolle), bien que ses arômes de fruits jaunes et de fleurs soient plutôt agréables, manque un peu de légèreté. La soirée se poursuit sur le parvis de la cathédrale pour un spectacle son et lumière, et se termine dans le hall de l’hôtel où nous testons deux champagnes de petits producteurs. Je découvre à cette occasion que n’est pas Ruinart qui veut : l’un des deux est bouchonné, l’autre présente une sorte d’astringence déplaisante au fond de la bouche. Qu’à cela ne tienne, ce n’était qu’un petit préam-bulle !