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Raisin et sentiments
2 octobre 2015

Vins chiliens (9) : Maipo, un Finistère à boire. Cousiño Macul

Coup de cœur : Chili, Maipo, Cousiño Macul, Finis Terrae, 2011 (environ 18€)

Cousino_Finis

    Antidater mes articles ne fait rien à l’affaire : j’ai pris un retard monstrueux sur ce blog depuis la rentrée de septembre, et ma fonction de présidente de club œnologique, paradoxalement, n’est pas étrangère à ce ralentissement. En somme, toutes mes excuses ! pour me faire pardonner, j’enverrai une bouteille de Pol-Roger millésimé à tout lecteur qui commentera le blog d’ici fin 2015 [rire sadique].

    Pour plus d’une raison, j’ai jugé meilleur de terminer le récit de mon périple œnologique au Chili par des articles plus courts mettant en valeur deux maisons un peu à part dans ce creuset à vins qu’est la vallée du Maipo. Par contraste avec ma déconvenue à Concha y Toro, je garde un souvenir enthousiaste de Cousiño Macul, une propriété de taille humaine – enfin ! – encensée d’ailleurs par Michel Bettane.

Cousino_signe

    Macul, c’est le nom du lieu, un terroir calcaire de la vallée du Maipo au sud-est de la capitale, planté de vignobles dès le XVIe siècle. Cousiño, c’est le nom de la famille qui – cas unique dans la région – possède aujourd’hui encore le domaine fondé en 1856 par Don Matías Cousiño et son fils Luis. Ces entrepreneurs d’origine espagnole construisaient jadis leur fortune sur les mines de charbon, à présent plutôt sur l’immobilier ; le côté vinicole, lui, a su garder des proportions raisonnables, et c’est tout à son avantage.

    Dans la lumière rasante de ce matin d’hiver, je traverse le parc jonché de feuilles mortes où paissent deux chevaux de course. Dans la grande bâtisse en brique décorée d’effigies d’ancêtres illustres, je suis la seule à demander le tour en anglais et ni une ni deux, je pars en visite privée, avec un jeune guide qui maîtrise son sujet moins bien que moi… Peu importe, de toute façon la formule ici est d’une concision bienvenue. On commence par aller voir les quelques dizaines d’hectares de cabernet sauvignon et merlot qui servent à élaborer la cuvée icône, « Lota », et la cuvée premium, « Finis Terrae ». Les blancs et les vins plus industriels des gammes « Don Matías » et « Don Luis » proviennent d’autres parcelles, mais toujours dans la vallée du Maipo.

    La cave fait l’effet d’un musée grandeur nature : les murs cimentés au blanc d’œuf et les plafonds en bois abritent une collection d’anciennes machines à pomper ou à embouteiller. On passe entre deux imposantes rangées de foudres en bois de raulí (arbre andin typiquement chilien), vieux de cent vingt ans et utilisés jusqu’en 1998, avant d’arriver dans la salle où s’alignent, moins esthétiques mais plus fonctionnelles, les cuves inox où se déroule désormais la fermentation. Le tour est vite fini : tout ici est à une échelle réduite par rapport aux immenses domaines que j’ai pu voir au Chili, on se croirait presque en France !

Cousino_Matias

Don Matías Cousiño

    Certains noms ouvrent des portes, d’autres ouvrent des bouteilles. Une fois remontée dans la salle de ventes, quand je rencontre le sommelier et lui parle de Michel Bettane, venu ici quelques mois plus tôt, je me vois servir une dégustation sans commune mesure avec celle prévue dans la visite standard. On me propose d’abord le chardonnay de la gamme « Antiguas Reservas » (Maipo), 2014, dont la générosité est soulignée par une fermentation malolactique, une part d’élevage en fût neuf et quatorze degrés d’alcool. Au nez, le citron et l’ananas viennent relever la richesse onctueuse du bois et de la vanille ; la bouche est très ronde comme prévu, mais s’achève sur une note fruitée et acidulée. L’impression d’ensemble est très plaisante, bien plus que pour le deuxième blanc que je goûte par curiosité, un 100% sauvignon gris nommé « Isidora », qui manque beaucoup de saveur par comparaison : les fruits jaunes du premier nez sont éclipsés par une minéralité un peu poussiéreuse en bouche.

    Les stars de la dégustation sont bien sûr les deux grands rouges de cabernet et merlot, produits intégralement sur place. Je goûte « Finis Terrae » dans le millésime 2011 (83% cabernet sauvignon, 17% merlot) : dès le premier nez, le fruit s’épanouit pleinement, riche et mûr, déjà accompagné de notes terreuses et cacaotées, devenant plus intense et exotique avec l’aération. En bouche, le vin présente des arômes de caramel sur des tanins puissants et veloutés qui lui donnent une belle longueur. Toute étourdie par cette splendide expérience, je me tourne vers « Lota », la cuvée créée en 2003 pour devenir l’emblème de la maison. Le millésime 2008 (70% cabernet, 30% merlot), d’un rubis à reflets déjà orangés, est moins puissant que le vin précédent. Les arômes s’inscrivent dans une gamme classique et élégante de fruits compotés, mais la matière est moins dense que ce qu’on attend, avec un milieu de bouche qui pinote presque (un soupçon de carotte) et une finale subtile façon miel de forêt. C’est à la fois plus doux et moins gourmand que « Finis Terrae », mon chouchou de ce domaine, dont j’emporte une bouteille pour le tiers du prix du « Lota ». Comme quoi, ce n’est pas le bout du monde de trouver du bon vin…

Cousino_chevaux

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