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Raisin et sentiments
30 août 2015

Vins chiliens (5) : Cachapoal. Altaïr

Altair_Benmayor

    À travers le brouillard qui drape la vallée du Cachapoal, la voiture cahote sur un chemin de terre dans une campagne où l’on ne croise guère que des ouvriers viticoles et des ibis à tête jaune. Nous sommes invités ce matin par Claudia Gómez-Martinez, la directrice commerciale du vignoble Altaïr, qui, ne pouvant être là en personne aujourd’hui, nous a confiés à sa collègue allemande, Nadine Block. Celle-ci nous accueille ainsi que Charles, exportateur de vins chiliens en France, sur une sorte de terrasse couverte au bord des vignes. Nous faisons donc connaissance entre gens du vieux continent en réchauffant nos mains gelées sur une tasse de thé ; puis Nadine nous emmène vers le bâtiment principal, un rectangle austère aux murs de moellons irréguliers couleur brique.

Altair_sculpture

Sculpture représentant la constellation de l’Aigle.

    Altaïr est le vin-phare du géant San Pedro, le deuxième plus grand producteur du Chili (après Concha y Toro, bien sûr). Son nom, celui de l’étoile la plus brillante de la constellation de l’Aigle, reflète sa position à la tête des cinq stars de la compagnie, les Grandes vinos de San Pedro, soit dans l’ordre : Altaïr, Cabo de Hornos, Kankana del Elqui, Tierras Moradas et Sideral. À l’exception du Kankana (100% syrah de la vallée de l’Elqui, vers le nord), tous ces vins sont des assemblages, à base de carménère de Maule pour Tierras Moradas et à base de cabernet sauvignon du centre du pays pour les trois autres. Ici, on ne s’occupe que de la production de deux vins : le fameux Altaïr (appellation Cachapoal) et son petit frère Sideral (sous l’appellation plus vaste de Rapel). Les premières cuvées remontent à 2002, mais la valeur n’a pas attendu le nombre des années. Nous découvrons ici un chai très moderne, un cellier dont les fenêtres filtrent la lumière du soleil, une fermentation avec levures sélectionnées… Rien n’est laissé au hasard ; d’ailleurs, à la manière d’un très grand cru français, Altaïr n’est pas produit dans les mauvaises années comme 2012.

Altair_bouteilles

    Pour la dégustation, nous remontons dans une salle sobrement chic, éclairée par une immense baie vitrée et décorée d’œuvres d’artistes chiliens contemporains (notamment Samy Benmayor, dont les tableaux ont inspiré les étiquettes des bouteilles). On nous sert trois vins accompagnés de leurs fiches techniques. La robe grenat sombre du Sideral 2011 (69% cabernet sauvignon, 13% syrah, 10% carménère, 5% cabernet franc, 3% petit verdot) laisse transparaître quelques sédiments : ici, on ne filtre pas les vins. Le nez annonce d’emblée le bois : cacao torréfié, cuir, truffe… Le fruit est mûr, concentré, un peu confit. En bouche, l’attaque est franche, avec une puissance portée par des tanins veloutés mais robustes et une certaine acidité ; des arômes de rose fanée et de cassis ressortent. La finale manque encore un peu de maturité.

    Nous attaquons le deuxième verre, un Cabo de Hornos 2010 (appellation Valle Central, soit 84% cabernet sauvignon et 4% syrah de Cachapoal et 12% malbec de Maule) : à celui-ci, le chêne confère des parfums très doux et vanillés par-dessus une trame de cerise et de fleurs. Si le Sideral avait parfois des accents médocains, le Cabo de Hornos rappelle plus un style de saint-émilion. L’attaque est ronde, le milieu de bouche intense et savoureux, la finale un peu plus acide et tannique.

    Le dernier vin est bien sûr un Altaïr, millésime 2010 (76% cabernet sauvignon, 13% syrah, 7% carménère, 4% petit verdot). Tout y est : la vanille et le caramel, le café et le chocolat, la cerise, le cassis, la framboise, le poivron rouge… Rien qu’à l’odorat, on déguste déjà quelque chose de gourmand, de sucré, d’un peu exotique. L’usage du bois est ici maîtrisé : un vin qui jusqu’au millésime 2007 vieillissait 15 mois en fût neuf est à présent laissé 10 mois dans des barriques 50% neuves, 50% usagées. La bouche est racée, avec des tanins veloutés et une matière très dense. Le potentiel de garde est évident, c’est presque dommage d’ouvrir cette bouteille maintenant. En fin de compte, Cabo de Hornos est peut-être le plus agréable à déguster jeune, tandis qu’Altaïr reste le beau ténébreux de la bande. Mais c’est avec du Sideral que nous repartons finalement : même à 45.000 pesos, Altaïr reste très cher, alors que son second vin, à moins de quinze euros, est une affaire en or. Si vous en avez l’occasion, profitez de ces prix exceptionnels que propose la propriété, deux à trois fois moins élevés que ceux du commerce. Et n’hésitez pas à laisser respirer votre Sideral : après quelques minutes d’aération, vous trouverez son évolution vraiment sidérante…

Altair_encas

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