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Raisin et sentiments
17 août 2015

Supermarché Leclerc : le revers des médailles

Coup de cœur : Bordeaux supérieur, Château de Reignac, 2011 (environ 9,50€).

Reignac

    Suite des vacances et autre voyage, cette fois-ci dans l’Yonne, près d’Auxerre. Outre sa proximité avec Chablis, Auxerre présente l’intérêt d’avoir un supermarché Leclerc, doté d’un rayon vins assez bien fourni. Outre le désormais fameux grand vin de Reignac, dont la chaîne Leclerc est le partenaire inconditionnel, on trouve là une vitrine pleine de trésors insoupçonnés : du Château Yquem à 80€ la demi-bouteille, du grand vin de Poujeaux, des chambolle-musigny…

    Mais ce n’est pas de cela qu’il s’agit aujourd’hui. Plutôt que de se ruiner avant de partir en vacances, l’idée est de trouver un vin honnête et abordable pour accompagner le barbecue, les plats froids ou tout simplement un apéritif en terrasse. Nous avons donc joué le jeu du citoyen estivant qui, un peu perdu parmi les centaines de références du supermarché, s’en remet aux promesses de l’étiquette. Innombrables sont les médailles attribuées chaque année dans des concours de vins à toutes les échelles. Bien entendu, ces récompenses ont une finalité avant tout commerciale : ainsi, les supermarchés créent leurs propres labels de qualité pour orienter le choix de l’acheteur ; quant aux autres prix décernés, il n’en est pas un auquel je ferais une confiance aveugle, bien que je retrouve partout les logos du Concours Général Agricole dont j’ai été jurée en 2014. Il faut dire qu’à la base de ces compétitions, il y a surtout de l’argent et de la publicité : si un producteur ne peut pas s’offrir le coût souvent conséquent de l’inscription, ou s’il ne convoite pas particulièrement le prestige d’un colifichet doré, vous ne verrez jamais ses bouteilles ornées d’une médaille, quelle que soit leur valeur. Alors, peut-on se fier aux collerettes en carton, labels brillants et autres macarons ? La réponse est plutôt négative : certes, les vins récompensés le sont souvent pour une raison ; mais il faut toujours garder à l’esprit que, chaque concours ayant ses spécificités (présélection, jury, critères…), la garantie de qualité représentée par le bronze, l’argent ou l’or est toute relative (écoutez ici le podcast instructif de Yann Rousselin à ce sujet).

 

    Voyons ce que cela donne en pratique sur un échantillon d’une demi-douzaine de vins. Commençons par les blancs, avec une intéressante comparaison de deux rieslings d’Alsace, millésime 2013, tous deux distingués l’année suivante par la même médaille.

Alsace riesling, Henri Ehrhart Réserve particulière, 2013, médaille d’or 2014 au Concours Général Agricole (environ 5€) : un vin franchement peu expressif et assez décevant. On perçoit les agrumes, ainsi qu’une minéralité légèrement saline en bouche ; la texture est serrée, l’ensemble est très sec.

Schoech

Alsace riesling, Albert Schoech, 2013, médaille d’or 2014 au Concours Général Agricole (environ 7,50€) : le nez est plus fruité (agrumes, fruits jaunes), l’expression en bouche est saline et sucrée à la fois, avec une longueur végétale légèrement amère. En termes de vins d’Alsace, il est plus typique que le précédent, mais ce n’est pas un chef-d’œuvre, même pour son prix modique.

 

    Passons à un rouge de plaisir, léger et fruité : facile de trouver du beaujolais au supermarché, mais pas évident d’en avoir du bon !

fleurie

Fleurie, Château des Loges, 2012, médaille d’or 2013 au Concours des Grands Vins de France à Mâcon (environ 8,50€) : encore un vin très caractéristique de son cru. Nez d’épices douces, de fruit rouge mûr, de fraise avec une pointe de musc, bouche friande et peu tannique, un vin facile à boire même par temps chaud.

 

    Mais en rouge, l’artillerie lourde vient de Bordeaux, comme toujours. Comparons encore un couple de bouteilles du même millésime, récompensées au même concours.

Delor

Bordeaux, Delor réserve, 2012, médaille d’argent 2014 au Concours mondial de Bruxelles (environ 6€) : Delor, toujours Delor… Issue d’une maison qui produit des gammes de vins par dizaines, cette bouteille arbore une collerette voyante qui liste les distinctions obtenues sur les dix derniers millésimes (principalement au Challenge International du Vin et au Concours de Bordeaux Vins d’Aquitaine). Le merlot domine cet assemblage très consensuel avec sa saveur fruitée, riche, son boisé doux qui évoque le caramel au lait. L’ensemble est gourmand et flatteur.

Médoc, Château Tour Prignac, 2012, médaille d’or 2014 au Concours mondial de Bruxelles (environ 8,50€) : de nouveau un vin vraiment typé, avec ses notes très boisées, sa petite touche de cuir et de musc, sans oublier l’arôme de poivron du cabernet. Plus tannique et austère que le précédent, de toute évidence, il accompagne bien les viandes rouges.

 

    Et maintenant, la star des supermarchés Leclerc, que Miss Glouglou m’a fait connaître : Château de Reignac, un domaine de l’Entre-Deux-Mers qui épile et efface les grands crus dans les dégustations à l’aveugle, et ne se prive pas de s’en vanter (même s’il s’en trouve pour contester l’objectivité de cette distinction). Parmi la gamme produite par Château de Reignac, c’est le grand vin qui a fait parler de lui pour son exceptionnel rapport qualité-prix, et c’est donc par lui que nous commençons.

Reignac_grand_vin

Bordeaux supérieur, Château de Reignac, Grand vin de Reignac, 2012 (environ 22€) : au nez des arômes très doux de caramel au beurre, de mûre et de cassis confiturés, de rose, avec un bouquet complexe que l’on retrouve en rétro-olfaction. La bouche est à la fois bien structurée et d’une rondeur remarquable, due à une maturité optimale du fruit ; les tanins sont bien présents, mais veloutés. En somme, un beau vin très bien fait, même s’il ne me fait pas tomber en pâmoison.

C’est le moment d’avouer qu’en fait, je trouve l’entrée de gamme de la maison, Château de Reignac tout court, d’un bien meilleur rapport qualité-prix. Il me semble que Leclerc en vend, mais je m’en procure au Monoprix.

Bordeaux supérieur, Château de Reignac, 2011, médaille d’argent 2014 au Challenge International du Vin (environ 9,50€) : un abord agréable, avec beaucoup de fruit rouge mûr, une touche de vanille, mais aussi une nuance légèrement terreuse ; la bouche est soyeuse, profonde et ne manque pas de tanins. Un bordeaux supérieur qui pour une fois mérite bien son nom, tout en gardant le prix de son appellation !

 

    En somme, il vous faudra explorer vous-mêmes la jungle des grandes surfaces pour dénicher les pépites auxquelles vous pourrez rester fidèles ensuite, et dans cette recherche, je crains fort que les médailles ne vous soient pas très utiles (c’est bien pour cela que je ne les mentionne jamais en citant un vin). Car s’il arrive aux supermarchés d’avoir Leclerc de génie dans leur sélection, sachez que tout ce qui brille n’est pas d’or !

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