Week-end à Bordeaux (1) : aux grands crus les grandes cuites

Crève-cœur : Bordeaux, Pomerol, La Croix de Gay, 2010 (environ 40€).

    C’est un véritable marathon. Samedi, dégustation toute l’après-midi pour le Week-end des grands crus à Bordeaux. Dimanche, suite du voyage œnologique avec une visite à Saint-Émilion. Lundi, Winelab de Bettane et Desseauve à Paris. Mardi, le club œno prend « un » verre avec ses homologues de l’ESSEC. Mercredi, soirée chez Pol-Roger pour mon équipe. Jeudi, concours de dégustation. Vendredi, salon de la RVF. Samedi, concours de la RVF et déjeuner au salon. Huit jours d’affilée où je peux vraiment avoir les foies… pour le mien [appréciez l’antanaclase avec recatégorisation].

    Commençons par le commencement. Nous sommes cinq (club et consorts) à nous retrouver à Bordeaux par cette belle journée. Pour la plupart, nous nous sommes levés à cinq heures et demie, et le sandwich au bord du fleuve est bienvenu avant l’assaut du Hangar 14, où sont réunis 120 domaines de l’Union des Grands Crus de Bordeaux. Armés d’un verre Riedel et d’un carnet de dégustation dont le sommaire suffit à faire rêver, nous abordons le grand hall où s’alignent les représentants des châteaux, groupés par appellations. À 75€ l’entrée plein tarif, le salon limite heureusement l’afflux de visiteurs, mais nous croisons tout de même un certain nombre d’autres étudiants de grandes écoles, ravis comme nous de passer une après-midi à goûter de grands bordeaux. Au bout de 4 heures, 13 appellations, 63 domaines et 96 vins plus tard, je ressors dans un état d’abrutissement béat, la bouche engourdie de tanins qui laisseront mes lèvres noircies pendant deux jours. Dur, la vie de dégustateur, surtout que vers l’heure de clôture le salon était devenu bondé, et pas du meilleur public. Et les vins, alors ? Chaque domaine présente son 2012 (bien souvent trop jeune et lourdement boisé) ainsi qu’un autre millésime. Voici ma (very) shortlist.

    BLANC SEC

Pessac-Léognan

Domaine de Chevalier 2012 : charnu, floral, aromatique, une bouche généreuse et ample (qui l’est encore un peu plus sur le 2011).

Château Larrivet Haut-Brion 2009 : un nez évolué (champignon, beurre noisette), des arômes gras qui se prolongent en bouche, gourmand et classieux.

    ROUGE

Pomerol

Château La Croix de Gay 2010 : gamme boisée grasse, du fumé, du champignon, bouche d’un beau velouté (le 2012 présente déjà de belles notes de caramel et vanille).

Moulis-en-Médoc

Château Maucaillou 2010 : parfums riches de fleurs et fruits exotiques, bouche intense et fruitée.

Margaux

Château Cantenac-Brown 2008 : nez complexe, fleurs fraîches, beau bouquet torréfié, une structure de vin de longue garde.

Saint-Julien

Château Beychevelle 2012 : magnifique expression (fruit surmûri, caramel), bouche fine et élégante (le 2006 présente des notes boisées avec une splendide évolution).

Château Branaire-Ducru 2009 : arômes boisés fondus, vanille, bouche toute en onctuosité.

Château Langoa-Barton 2009 : vin très rond, déjà évolué, velouté au palais.

Pauillac

Château Lynch-Bages 2007 : notes de poivron fumé, belle matière épicée, un poil austère.

Château Pichon Longueville Comtesse de Lalande 2005 : fruits noirs, cacao, un vin très mûr et soyeux (le 2012 a déjà de superbes notes torréfiées sur une bouche racée).

Saint-Estèphe

Château Lafon-Rochet 2007 : parfums corsés de tabac, de café, structure impressionnante !

    MOELLEUX

Barsac

Château Doisy-Daëne 2010 : très belles notes originales de bougie brûlée, trame impeccable.

    Et maintenant, je peux pleinement profiter de la Fête du Fleuve, du charme de la ville, du quasi de veau du Bistrot d’Aurélie et du feu d’artifice sur les berges de la Garonne. Sacrifier sa santé hépatique pour des vins épatants, après tout, est-ce si Graves ?