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Raisin et sentiments
26 mai 2015

De Boüard chez Savoy : des primeurs Hubert-primées

Crève-cœur : Bordeaux, Saint-Émilion grand cru classé, Château Bellevue, 2009 (environ 68€).

bellevue

    Ce jour-là – une fois n’est pas coutume –, je m’étais bravement lancée dans une séance de travail à la bibliothèque. Quelques minutes après avoir demandé à mon directeur de thèse d’arrêter de me traiter d’alcoolique, je consulte mon agenda et m’aperçois que je devais participer aujourd’hui à une dégustation particulièrement alléchante, organisée par le célèbre propriétaire de l’Angélus, Hubert de Boüard, et qui commençait dès 15h. Ni une ni deux, je débauche mon mari, lui-même au labo, et voilà deux doctorants sacrifiant leur après-midi de travail pour l’amour du bon vin… non sans culpabilité, bien sûr.

 

escalier

    À force de zèle, nous nous retrouvons quai de Conti à trois heures tapantes et sommes les premiers à entrer dans l’hôtel de la Monnaie. C’est là que Guy Savoy ouvre demain son nouveau restaurant, qui héberge cette dégustation en guise d’inauguration. En haut d’un escalier monumental à l’architecture néoclassique, le chef nous accueille et on nous présente les lieux, une suite de salons d’un chic sobre et une cuisine toute d’inox rutilant. On peut voir là plus de quarante vignerons prestigieux : tous ont pour œnologue consultant (voire propriétaire) Hubert de Boüard, qui déambule tel un sultan dans son sérail. Il n’y a pratiquement que des bordeaux, dont la moitié de Saint-Émilion, le fief de la famille de Boüard. Ce fut un grand moment. Des producteurs parmi les grands noms de Bordeaux nous font déguster leurs vins en primeurs (souvent déjà appréciables) et dans d’autres millésimes ; on nous apporte de succulents petits plats sortis des cuisines de Guy Savoy (gaufre au beurre de truffe et parmesan, foie gras poêlé, volaille de Bresse glacée au vinaigre balsamique…) ; le tout dans un cadre étonnant, où certains vignerons se serrent dans la cuisine en plein coup de feu tandis que L’Angélus trône dans son petit salon privé.

cuisine

Voici une sélection, classée par appellations, de quelques domaines qui m’ont marquée parmi tant de belles rencontres.

 

Saint-Émilion premier grand cru classé A

Château Angélus : le médiatique et sulfureux Hubert de Boüard a su mettre en valeur l’héritage familial. En primeur 2014, l’Angélus présente des notes fumées et le cabernet qui représente la moitié du volume s’y affirme bien. En 2012, on retrouve des arômes de poivron et de torréfaction, mais les 60% de merlot y ajoutent du fruit. Nous terminons sur le 2006, un millésime fermé servi après un long carafage : très belle gamme d’iode, de fruits à noyau (je pense au longane), bouche longue et structurée.

 

Saint-Émilion grand cru classé

Château Bellevue : partiellement racheté par la famille de Boüard, il réussit à me séduire davantage que l’Angélus – peut-être aussi parce qu’il présente là son meilleur millésime. En 2014 (100% merlot), ses notes d’iode et d’épices s’allient à une bouche toute en puissance et opulence. En 2009, quelle gourmandise ! L’arôme champignonné de l’évolution commence à poindre, la bouche est charnue et absolument superbe. Un chef-d’œuvre !

 

Graves

Château de Chantegrive : leurs rouges sont un peu rustiques pour moi, mais les blancs (moitié sauvignon, moitié sémillon) valent le détour. Le 2014 sent le pamplemousse et allie en bouche les agrumes aux fruits jaunes ; le 2012 semble beaucoup plus âgé, avec des notes balsamiques et de sous-bois et une trame bien plus sèche que le premier. Dans les deux cas, de jolies découvertes !

 

Saint-Estèphe

Château Meyney : le 2014 est velouté, chaleureux, avec un côté floral et musqué déjà charmeur. 2010 est plus fruité, le bois lui donne une légère amertume, mais quelle structure ! Pour 20€ en primeur, je n’hésiterai pas à en commander pour ma cave.

 

Afrique du Sud

Klein Constantia : last but not least, une célébrité des vins étrangers dont Hubert de Boüard est encore une fois copropriétaire… À cette table sont présentés non seulement le « Vin de Constance », muscat doux de renommée mondiale, mais également un rouge et un blanc. Le rouge, un assemblage de syrah, cabernet sauvignon et merlot (2008), provient d’Anwilka, un domaine de la région de Stellenbosch récemment fusionné avec Klein Constantia ; il intrigue par son nez épicé et chocolaté, associé à une bouche de style assez bordelais. Le blanc est un 100% sauvignon (2013), dont le nez très végétal cache une bouche solaire, fruitée, avec un léger perlant. Enfin, le fameux Vin de Constance (2009), élaboré à partir de raisins passerillés sur grappe, présente des arômes extraordinaires de pamplemousse et de gomme qui se développent en bouche avec du miel et de l’abricot sec (et 160g/L de sucre résiduel !).

 

Quelques heures plus tard, je sors en titubant, radieuse et comblée. Ma journée de recherche est définitivement fichue : bonne chère et travail ne sont pas très compatibles, mais il y a bien quelques occasions où l’on doit saisir l’une aux dépens de l’autre, car quand le vin est tiré, il faut le Boüard !

salon

 

 

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